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Fake news

6 avril 2018

Ce que sont les « fake news » et les raisons qui poussent les uns et les autres à les produire, les diffuser ou s’opposer à leur diffusion.

C’est l’une des expressions préférées du Président des États-Unis. Dès lors qu’il est contredit, il twitte  ou s’écrie « fake news ». Avec lui ou grâce à lui, l’expression est à la mode.

Le 3 avril 2018, la commission de la culture et la commission des lois du Sénat ont organisé une table ronde sur le sujet, pour préparer l’examen au Parlement d’une proposition de loi visant à lutter contre les "fake news", projet annoncé par le Président de la République le 3 janvier 2018.

C’est quoi, une « fake news » ?

Si on le décompose, le terme est :

  • « fake » qui signifie faux, mais dans un sens péjoratif (sinon ce serait « wrong » !) et pourrait se traduire plutôt par : truqué, contrefait, feint, fabriqué
  • « news » que l’on peut traduire par : informations, nouvelles

Lors de l’audition qui a eu lieu au Sénat, M. Philippe Bas (Président de la commission des lois), a traduit cela comme « fausses nouvelles sur Internet ». L’un des intervenants propose le terme de « mal-information ».

Mme Catherine Morin-Desailly (Présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication) a ajouté :

Il est regrettable que le mot « fake » n’ait pas été bien traduit, parce que la vraie question aujourd’hui c’est la manipulation de l’opinion à travers les réseaux sociaux et le mot fake a une connotation de manipulation, de désinformation, de nouvelles perverties.

Comme le dit une traductrice, citée par Télérama :

Le terme anglais compte la notion de tromperie délibérée. “Information fallacieuse” pourrait être une bonne alternative (…) désinformation est proche du sens. 

Et un historien renchérit :

(…) mensonges, bobards ou canulars ont toujours existé. « Fake news » comporte de nombreuses nuances, allant de l’affabulation (un faux inventé, une variante de la diffamation), à l’ironie (le plus gros possible pour jouer sur la crédulité) en passant par la simple rumeur (où un fond de vérité est possible). 

Pour synthétiser, les « fake news » sont des informations fausses qui visent à nuire à celui ou celle qui en est l’objet ou le sujet.

Pourquoi faire une loi sur les fake news ?

Il existe déjà une loi qui considère les « fausses nouvelles » comme des délits. Cette loi date de… 1881 et définissait déjà les droits de la presse, ses devoirs et les délits qui peuvent être punis.

L’article 27 dispose :

La publication, la diffusion ou la reproduction, par quelque moyen que ce soit, de nouvelles fausses, de pièces fabriquées, falsifiées ou mensongèrement attribuées à des tiers lorsque, faite de mauvaise foi, elle aura troublé la paix publique, ou aura été susceptible de la troubler, sera punie d'une amende de 45 000 euros. 

La dernière mise à jour de cette loi date de 2002.

Depuis, Internet a changé la donne, plus encore avec les réseaux sociaux surgis en 2004, même si le fond du problème reste le même.  Le Sénateur Philippe Bas l’a dit clairement :

Tout ce qui relève de la liberté d’expression, et tout ce qui relève du droit pénal, exige de tremper sa plume dans l’encrier à plusieurs reprises.

Le ministère de la Culture, à l’origine d’un nouveau texte, écrit :

Notre sujet n’est pas de définir ce qu’est une fausse nouvelle. Le vrai sujet est l’univers, les tuyaux, les canaux de diffusion des fausses nouvelles aujourd’hui (Libération, 12 février 2018). 

La loi devrait porter sur trois points :

  • Permettre au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) de suspendre ou d'interdire une radio ou une télévision s'il estime qu’elle propage une fausse nouvelle.
  • Créer de la transparence sur les « contenus d’information » ou les contenus « sponsorisés » de Facebook,Twitter, Youtube, entre autres. Qui publie, combien a coûté la visibilité du contenu ?
  •  Agir rapidement contre la désinformation. Il sera possible de saisir un juge des référés (pour un jugement rapide) « pour faire cesser la diffusion massive et artificielle d’une fausse nouvelle » dit le ministère.

Humour et canulars

Pour finir, il faut bien faire la part des choses entre les « fake news » et l’humour ou les canulars, notamment ceux du 1er avril.

Cette année, un député a annoncé, en direct à la télévision, que son métier étant trop difficile, il démissionnait. Puis, très rapidement, devant la journaliste médusée,  il a sorti un poisson en papier et tout le monde s’est mis à rire.

On a pu lire aussi que le groupe Daft Punk se mettait à la flûte à bec, que des mygales aideraient les douaniers dans la recherche de drogues ou que des aigles permettraient de contrôler la vitesse sur les routes. Là, ce sont des canulars !

Certains sites et journaux se sont fait une spécialité de la satire et de l’humour. La différence est que les informations données sont tellement énormes (comme un bonbon au chocolat vert qui obtiendrait, aux États-Unis, le statut de légume) que tout le monde se rend compte très vite qu’il s’agit d’une blague.

Mais toujours, ce qu’il faut, « c’est être capable de faire le tri dans les informations et d’effectuer des choix pertinents » écrit le pédagogue Philippe Meirieu en introduction d’un ouvrage intitulé : « Former l’esprit critique ».

Pour en savoir plus

Le clip vidéo de la table ronde qui a eu lieu au Sénat

Et dans d'autres pays ?

Bien entendu, il n'y a pas que la France qui débat de la question.

  • Allemagne : les députés ont voté une loi contre "la diffusion sur les réseaux sociaux de propos haineux mais aussi de fausses informations, de propagande terroriste et de pornographie infantile" en juin 2017.
  • Brésil : un peu avant les élections, un tiers des partis politiques (seulement un tiers !) a signé un accord "contre la diffusion de fausses nouvelles".
  • Malaisie : loi anti-fake news punissant les coupables de prison (jusqu'à 6 ans) et 130.000 $ d'amende.
  • Kenya : 42.000 € d'amende et/ou 2 ans de prison. Mais la loi a été suspendue en attente d'une étude par la Haute cour du pays.

(Données AFP : bur-ot/alc/phv 13/08/2018)